Comme pour le métier de correspondant, le statut de grand reporter représente l’indépendance de la profession. A la grande différence que ce dernier dépend directement du rédacteur en chef qui l’envoie sur le terrain lors de grands événements comme des guerres ou les attentats.
Du journalisme de terrain
Lorsque l’on pense au grand reporter, on a l’image du journaliste qui parcourt les continents au péril de sa vie, un carnet usé à la main. Il peut travailler aussi bien à Paris, dans une ville de province comme aux quatre coins du monde. Mais son secteur ne se limite pas seulement aux conflits : il peut aussi se spécialiser dans d’autres domaines comme le sport ou bien l’économie.
Aujourd’hui, je me suis entretenue avec Anne-Charlotte Hinet, journaliste à France 2 depuis une dizaine d’années, afin d’en savoir plus sur son parcours et son quotidien en tant que grand reporter.
Elisa Humann : Pourriez-vous revenir en quelques mots sur votre parcours ?
Anne-Charlotte Hinet : Après des études de droit, je suis sortie diplômée de l’école de journalisme de Sciences Po Paris en 2008. J’ai été prise comme stagiaire à France Télévisions et été également pigiste pendant 2 ans à BFMTV et au bureau parisien de CNN. Ensuite, France 2 m’a proposé un contrat en CDD au service société puis aux Infos Géné Etranger (qui a fusionné avec le service étranger qui traite des attentats, police-justice, catastrophes, scandales financiers).
Je suis en contrat depuis 2011, j’ai été grand reporter pendant 3 ans et j’ai évolué en couvrant l’actualité en France et à l’Etranger. J’ai couvert par exemple des événements comme :
La mort de Mandela, la crise humanitaire des Yézidis, l’arrivée des migrants en Turquie et en Europe de l’Est, les élections brésiliennes, américaines…
Aujourd’hui, je continue à faire de l’actualité France (gilets jaunes, entre autres…).
Quels sont les avantages et les inconvénients liés à la profession ?
Grâce à la grande diversité de l’actualité, il n’y a pas de routine. Les missions sont plus ou moins longues et les situations exceptionnelles : on découvre différentes cultures et on peut aussi bien rencontrer un sans domicile fixe comme un Premier ministre.
Néanmoins, ce métier demande beaucoup de temps, c’est pourquoi il faut être très disponible.
Être grand reporter demande un engagement personnel important. On subit les rythmes de l’actualité, qui ne dort jamais.
Anne-charlotte hinet
Il faut savoir que l’on est parfois d’astreinte, on travaille un weekend sur deux ou même la nuit.
En quoi consiste le travail d’un reporter envoyé sur place?
Cela dépend de l’actualité et de chacun. On fait du reportage et des duplex. Mon job est de trouver les situations et les personnages qui vont permettre de raconter une histoire. On essaie de comprendre la problématique trouver des situations visuellement parlantes.
A l’étranger, mon rôle est de raconter à l’audience ou pendant des plateaux de situation, d’expliquer pourquoi on s’intéresse à ce qu’il se passe dans ce pays (ex : Venezuela). On essaie de donner le pouls d’un pays à un instant T.
Pouvez-vous nous expliquer à quoi ressemble votre journée type ?
Elle est différente selon l’endroit. Au bureau,je commence à 9h30 et je travaille sur les deux journaux télévisés. Avec l’équipe, on fait le montage, on décide ce que l’on va raconter en conférence de rédaction à 15h30 pour 20h : on définit l’ordre des sujets, on repart en montage ou en tournage. Il y a des jours où tu es envoyé sur place pour tourner pour le jour même. On sait pas ce qui peut se passer. Il faut parfois être à l’antenne pour TéléMatin. Les journées ressemblent à des courses. On part avec un monteur et un JRI. Journée de 5h30 à 23h.
Les journées ressemblent à des courses, il arrive que l’on passe 5 fois à l’antenne.
Anne-charlotte HINET
Comment voyez-vous le métier dans 10 ans ? Le poste de reporter à l’étranger a-t-il un avenir ?
C’est un métier qui est très contraignant et pas très bien payé. Si on est passionné par le terrain, ça peut fonctionner mais il faut savoir qu’il y a beaucoup d’appelés et peu d’élus.
Le métier de reporter a de l’avenir car même avec l’émergence des réseaux sociaux où tout le monde peut-être journaliste, il faut essayer d’avoir une histoire objective, neutre, avoir des sources, c’est une vraie compétence qui requiert une vraie formation.
Le métier est plus complexe que ça. Le grand fantasme des journalistes commandés par le pouvoir est complètement FAUX. Notre but est de vérifier, on ne peut pas parler de tout mais nous sommes un intermédiaire. S’il n’y a pas de journalistes, il n’y a que de la communication.
ANNE-charlotte hinet
Nous choisissons des angles pour analyser et décrypter. Le regard du journaliste est important sinon c’est soi de la communication ou de la propagande.
C’est pas parce que tout le monde s’improvise reporter qu’on est journaliste. C’est un prisme par lequel on raconte l’histoire. On a un rôle de montrer que les fake news existent et doivent être vérifiées. Le rôle du reporter va se renforcer sur la vérification de l’information. Au service public, notre culture fait qu’on a envie de montrer aux gens ce qui passe à l’autre bout du monde ou à 10000 kms.
Où vous voyez-vous dans 10 ans ?
J’adore ce métier que je me vois faire toute sa vie. Dans ces conditions c’est compliqué. Tout le travail est encore plus difficile à faire. J’aimerai occuper un poste à l’étranger.
